Et alors, c’est pour quand
Guy Delville
Chroniqueur gastronomique
Au revoir les chefs
Permettez-vous, amis lecteurs, d’évoquer trois chefs liégeois qui nous ont quittés très récemment. Pendant des dizaines d’années, ils ont animé la vie gastronomique liégeoise avec autant d’enthousiasme que de sens inné de la belle et bonne cuisine ainsi que du désir profond d’innover pour le plaisir de leur fidèle clientèle.
Jean-Marie Raisier
Diplômé de l’Ecole d’Hôtellerie en 1959, Jean-Marie Raisier a exercé, pendant plus d’un demi-siècle, le dur métier de traiteur, à domicile ou dans ses superbes salons de Crisnée. Le Traiteur Jean-Marie était connu et réputé pour ses préparations de choix et de qualité. Le magasin de la rue Lulay, en plein centre de Liège, était largement fréquenté grâce à ses spécialités locales auxquelles Jean-Marie avait ajouté son inimitable patte. En 2004, le magasin avait quitté Liège pour le seuil de la Hesbaye. Bien sûr, pour Jean-Marie c’était le massepain dont il détenait la recette familiale perpétuée par son fils Jean-Luc dans le très liégeois Passage Lemonnier. Le massepain est réalisé artisanalement à partir d’une pâte d’amandes travaillée à la main (moitié sucre, moitié amandes) sur des vieux moules en bois de 1860.
André Smets
Il y a quelques solides années, j’évoquais le travail exemplaire d’André Smets dans son établissement de Herstal : Chez André. Pendant quarante ans, il vous a reçu pour vous préparer ses goûteuses spécialités dans lesquelles le terroir trouve sa meilleure imagination et ses profondes saveurs d’authenticité. On ne travaille que le frais et les produits sont amoureusement choisis. Il connaît les bonnes adresses pour se procurer les meilleures fournitures. Il innove, il découvre, l’ami André, il se multiplie en de gentilles attentions qui font des plats aussi souriants que délicieux : des préparations « à l’ancienne » et des classiques de belle tenue dont le chef a gardé jalousement le secret et qui sont à l’image de la jovialité débonnaire du cuistot. Cette maison est un havre de paix et de plaisirs culinaires comme on aime en trouver et conseiller à ses amis, complétée, à la bonne saison, par une petite et sympathique terrasse.
Jean Colette
Quant à Jean Colette, il tenait les fourneaux du Moulin à poivre sur les hauteurs de Seraing. Je ne manquais jamais une occasion de mettre mes genoux sous la table de cette pétillante maison de bouche et de converser avec Carole, la souriante et efficace gestionnaire de la salle. Et j’évoquais : que ce soit dans la salle baignée de clarté ou sur la terrasse parfaitement au calme, vous pourrez découvrir la cuisine d’un artiste, un vrai, un pur, exigeant tant pour lui-même que pour ses produits ; les cuissons sont justes, les sauces (sa spécialité) s’harmonisent, avec bonheur, aux jolies préparations.